L’énergie et l’environnement sont les deux faces d’une même médaille. L’une alimente notre économie et notre quotidien, l’autre conditionne notre avenir et notre bien-être. Au Québec, cette dualité prend une dimension particulière, façonnée par un héritage hydroélectrique unique, des ambitions climatiques fortes et une nouvelle réalité industrielle en pleine effervescence. Comprendre leur interaction n’est plus une option, mais une nécessité pour quiconque souhaite naviguer avec succès dans le paysage économique et social de demain.
Cet article se veut un point de départ pour démystifier ces concepts parfois complexes. Nous aborderons les grands défis qui se posent à nous, des stratégies de décarbonation pour les entreprises à la révolution de l’économie circulaire, en passant par les opportunités offertes par les énergies renouvelables. L’objectif est simple : vous donner les clés pour comprendre les enjeux et identifier les leviers d’action à votre portée, que vous soyez un entrepreneur, un gestionnaire ou un citoyen curieux.
Le Québec jouit d’une position énergétique enviable. Notre parc hydroélectrique, souvent qualifié de « batterie de l’Amérique du Nord », nous a permis de développer une économie basée sur une électricité propre et abordable. Cet avantage concurrentiel historique est aujourd’hui plus pertinent que jamais. Il a par exemple donné naissance à l’aluminium vert, un produit à faible empreinte carbone très recherché sur les marchés mondiaux, illustrant comment un atout environnemental peut devenir un puissant moteur économique.
Cependant, ce portrait est confronté à de nouveaux défis. La demande énergétique explose, tirée par l’arrivée de nouvelles filières industrielles gourmandes en électricité, comme les centres de données et la production de batteries. Simultanément, le Québec se positionne comme un leader dans l’extraction de minéraux critiques et stratégiques (lithium, nickel, graphite), essentiels à la transition énergétique mondiale. La question n’est donc plus seulement « comment produire de l’énergie propre ? », mais « comment utiliser notre énergie propre de manière stratégique tout en respectant nos objectifs climatiques et environnementaux ? ».
Pour une entreprise, la responsabilité environnementale a longtemps été synonyme de recyclage et de conformité réglementaire. Aujourd’hui, cette vision est dépassée. La véritable responsabilité s’ancre dans une approche globale qui considère l’ensemble du cycle de vie d’un produit et de la chaîne de valeur d’une entreprise. Il ne s’agit plus de gérer ses déchets, mais de ne pas en produire.
C’est ici qu’intervient le concept de croissance découplée. Imaginez une boulangerie qui, au lieu d’acheter plus de fours pour faire plus de pain (croissance linéaire), apprend à optimiser ses recettes et la chaleur de son four existant pour produire plus de pain avec moins de farine et d’énergie. C’est ça, la croissance découplée : générer plus de revenus et de valeur avec moins de ressources et d’impact. Pour y parvenir, les entreprises visionnaires élaborent une feuille de route de décarbonation, un plan d’action concret qui transforme les contraintes environnementales en opportunités d’innovation et de performance.
On ne peut améliorer que ce que l’on peut mesurer. Cette maxime est au cœur de toute démarche environnementale sérieuse. Avant de pouvoir réduire son impact, une entreprise doit d’abord le quantifier. Deux outils sont fondamentaux pour commencer ce travail.
Réaliser un bilan de gaz à effet de serre (GES) peut sembler intimidant, mais il peut être simplifié. Il s’agit de cartographier ses émissions selon trois périmètres, ou « scopes » :
Commencer par les scopes 1 et 2 est une première étape accessible et essentielle pour identifier les sources d’émissions les plus importantes et les plus faciles à réduire.
Pour de nombreuses PME, particulièrement dans le secteur manufacturier ou la métallurgie, la facture d’électricité est l’un des plus grands postes de dépenses. L’efficacité énergétique n’est donc pas qu’un geste pour la planète, c’est un levier de rentabilité direct. Les actions peuvent être étonnamment simples :
Ces « fruits à portée de main » permettent souvent de réaliser des économies substantielles avec un investissement minimal, libérant des fonds pour des projets de plus grande envergure.
L’ère du « tout à l’enfouissement » tire à sa fin. Le modèle économique linéaire (extraire, fabriquer, consommer, jeter) atteint ses limites. L’avenir appartient à l’économie circulaire, un modèle où les déchets des uns deviennent les ressources des autres.
Un déchet est simplement une ressource qui n’est pas au bon endroit. Mettre en place un système de gestion des matières résiduelles efficace, c’est d’abord caractériser ses flux pour comprendre ce que l’on jette. Souvent, une part importante peut être non seulement recyclée, mais valorisée, c’est-à-dire transformée en un nouveau produit ou une source d’énergie, générant ainsi des revenus au lieu de coûts d’enfouissement.
Cela implique parfois de mettre en place une logistique inverse : un système pour récupérer ses propres produits en fin de vie auprès des clients. C’est un changement de paradigme : l’entreprise ne vend plus seulement un produit, mais la responsabilité de sa gestion jusqu’à sa nouvelle vie.
Pour vraiment comprendre l’impact d’un produit, il faut adopter une vision complète, de son berceau à sa tombe. C’est le rôle de l’Analyse du Cycle de Vie (ACV). Une ACV, même simplifiée, examine l’empreinte environnementale à chaque étape : extraction des matières premières, énergie de fabrication, transport, utilisation par le client, et enfin, recyclage ou élimination. Cet outil puissant permet d’identifier les véritables « points chauds » environnementaux et de prendre des décisions éclairées pour concevoir des produits plus durables et, à terme, plus compétitifs.
La transition énergétique ouvre aussi la porte à un nouveau rôle : celui de producteur d’énergie. Grâce aux avancées technologiques et à des cadres réglementaires comme l’option de mesurage net d’Hydro-Québec, il est désormais possible pour une entreprise ou même un particulier de produire sa propre électricité et d’injecter les surplus dans le réseau.
Plusieurs options peuvent être envisagées, selon le contexte spécifique d’un site :
Construire un plan d’affaires solide pour l’adoption de ces technologies est la clé pour transformer un projet environnemental en un investissement rentable qui renforce l’autonomie et la résilience de l’entreprise.
La convergence de l’énergie et de l’environnement dessine les contours d’une transformation économique et sociale profonde. Loin d’être une série de contraintes, elle représente un formidable champ d’innovation, de compétitivité et d’opportunités pour le Québec. En comprenant ses mécanismes, en mesurant notre impact et en repensant nos modèles, nous pouvons collectivement bâtir un avenir à la fois prospère et durable. Le chemin est tracé; il ne reste plus qu’à l’emprunter, pas à pas.